En Mayenne, une vente se transforme en colocation digne d’un conte moderne entre un couple d’acheteurs et une septuagénaire
À l’approche de l’hiver, les histoires qui font chaud au cœur se savourent encore plus. Et quand cela touche tout à la fois les propriétés familiales depuis des générations, l’attachement à son foyer et les rencontres qui changent une vie, un (court) récit s’impose. Rencontre avec Maryline, 74 ans, et Grégory et Jean, un couple de quadragénaires, que les soubresauts du destin ont réunis sous le même toit pour une colocation solidaire totalement inattendue et riche de sens.
Devenue veuve, Maryline doit mettre sa maison en vente...
C’est d’abord l’histoire de Maryline, qui vit depuis 52 ans dans une grande ferme aux Groies, à Cossé-en-Champagne. Plus précisément depuis le 23 décembre 1972, jour où elle est venue s’y installer définitivement, après y avoir passé une grande partie de son enfance à l’occasion des vacances. Une bâtisse intrinsèquement liée à son histoire familiale, puisqu’elle a été transmise de mères en filles au fil des générations, depuis le 19e siècle. Sa mère y est née, sa grand-mère y a vécu toute sa vie, et il aurait dû en être naturellement de même pour Maryline, si les « choses de la vie » n’en avaient pas décidé autrement... Maman de deux grandes filles ayant quitté le foyer, la septuagénaire s’y retrouve seule après le décès de son mari, en 2018. Et elle va hésiter de longs mois avant de se résoudre à mettre la propriété en vente. Il faut dire que cette ferme et ses quelque 15 hectares de terrain sont devenus trop lourds à entretenir pour elle...
Les Groies est un lieu-dit situé à Cossé-en-Champagne, petite commune du Sud-Mayenne dans la vallée du Treulon, non loin de Sablé-sur-Sarthe.
Mais rien ne se passe comme prévu et les projets de vente floppent les uns après les autres
À contrecœur, elle décide alors de mettre le domaine des Groies à la vente en novembre 2019. La période est propice : les taux d’emprunt sont à leur plus bas niveau historique, et les candidats à l’achat en quête de nature et de grands espaces, de plus en plus nombreux. Les visites s’enchaînent. Vient le temps de la première promesse de vente, tandis que Maryline trouve un bien qui lui correspond non loin de là, dans la commune de Brûlon. Tout semble se dérouler comme prévu, mais c’est sans compter les pieds de nez du destin. Et c’est peu dire, puisque la crise sanitaire et les confinements successifs viennent bousculer le quotidien et les projets de milliers de Français, et mettre un coup d’arrêt brutal aux transactions immobilière en cours. Au final, Maryline fera les frais de quatre annulations de promesses de vente, rendant caduque son projet d’achat à Brûlon. Entre hasards et coïncidences, la Cosséenne voit là autant de signes que son histoire avec sa demeure est tout sauf terminée. « Cette maison ne voulait pas que je la quitte », a-t-elle confié, un peu à la façon d'une prémonition. Pourtant, un couple d’acquéreurs séduit par la propriété de Maryline s’apprête à entrer en scène...
Rencontre du 3e type, et plus si affinités
Après des promesses d’achat parties en fumée et une vente qui s’annonce finalement difficile, c’est au tour de Grégory et Jean de faire leur apparition fin 2022. Âgés respectivement de 47 et 42 ans et originaires, l’un de l’Ardèche, l’autre de la Meuse, le couple vit à Paris et souhaite désormais troquer le milieu urbain contre une ambiance naturelle et campagnarde, façon retour aux sources. Non sans moults projets plein la tête : « Nous voulions un terrain naturel, une rivière, un environnement naturel propice pour développer une activité agricole autonome », précisent-ils. Dès leur première visite aux Groies, ils tombent littéralement sous le charme des lieux. Les dés sont jetés : « On s’est dit, c’est ici. », ajoutent-ils. Cette fois, les événements se déroulent sans encombre : le coup de cœur est acté, le prêt immobilier, accepté, et la rencontre entre Maryline et le couple, chaleureuse et complice. La suite des événements est digne d’un conte moderne, où ouverture d’esprit, solidarité, rencontres et affinités font des merveilles.
Une proposition inattendue va combler Maryline de bonheur
Grégory et Jean connaissent bien les péripéties qu’a connues Maryline depuis la mise en vente de sa maison, 3 ans plus tôt. Ils savent tout du flop de son projet d’achat à Brûlon, et surtout de son attachement indéfectible aux Groies. Pour couronner le tout, au moment pour eux de s’installer dans leur nouvelle demeure, Maryline n’a toujours pas trouvé de maison. « On n’imaginait pas lui dire merci et au revoir. On s’est dit qu’on n’avait qu’à lui proposer de rester habiter là », confie le couple. La propriété des Groies est grande et comprend même une fermette indépendante. C’est alors qu’une idée lumineuse s’impose à eux : proposer à Maryline de « cohabiter » avec eux, sans contrepartie financière, le temps pour elle de trouver un autre logement. Maryline en reste sans voix et y décèle probablement un nouveau signe du destin par rapport aux liens qu’elle entretient avec les Groies.
Une famille recomposée d’un tout nouveau genre
Quelque 18 mois plus tard, la colocation « intergénérationnelle » va plus que bon train et personne ne semble avoir envie d’y mettre un terme. Maryline partage avec eux des trucs et astuces pour l’entretien de la propriété, l’histoire des lieux à travers les âges, et ne manque pas de présenter le couple à tout le voisinage. « Dès le début, ça a été un grand facteur d’intégration. Nous avons pu créer rapidement un réseau d’amitié. Ça nous a mis des racines », confie Grégory. Entre repas et moments privilégiés partagés, les trois « colocataires » s’amusent aujourd’hui de leur différence d’âge, de goûts, de modes de vie, et savourent cette aventure comme une expérience unique et pleine de sens. Un peu à la façon d’une famille recomposée, hors des sentiers battus, que Maryline résume à merveille quand elle affirme : « Maintenant, j’ai deux fils de plus ! ».
Devenu intarissable sur la vallée du Treulon, sa géologie, ses écosystèmes, sa biodiversité, ses prairies et ses rivières enchantées, Grégory propose depuis mars dernier des visites des lieux tous les samedis pour permettre aux habitants de la vallée de découvrir toutes ses richesses.
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