Malgré la forte pénurie de logements et l’appel des professionnels pour y faire face, aucun des deux candidats n'a fait du logement une priorité de son programme. Passons tout de même en revue les mesures affichées par Emmanuel Macron et Marine Le Pen.
Bilan en demi-teinte sur le logement social pour Macron
Le président sortant affiche un bilan en demi-teinte sur le logement. En effet, certaines mesures ont été mal digérées par les Français et les acteurs du secteur, notamment la baisse de 5 € par mois des aides au logement (APL) et la réduction du loyer de solidarité pour les bailleurs sociaux. Ce dernier point ressort pour les bailleurs comme étant la cause du faible nombre de logements sociaux construits en 2021 : 94 000 au lieu des 120 000 annoncés.
Faux a répondu Emmanuel Macron face à Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, en février dernier : « Leur capacité d'investissement a augmenté de 33 % depuis 2016 », a-t-il assuré. Le gouvernement a également donné un coup de pouce fiscal aux maires fin 2021 pour les inciter à construire plus : la compensation par l’État de l’exonération de taxe foncière pour 10 ans dont bénéficient les logements sociaux, le tout pour un coût de 70 millions d’euros par an. Le rapport de la Fondation Abbé Pierre s’est, en revanche, félicité de la loi SRU, qui fixe un minimum de 20 % ou 25 % de logements sociaux selon les communes, au-delà de 2025.
En termes d’aide au logement des personnes sans domicile fixe, le gouvernement peut compter sur son bilan. En effet, son initiative « Logement d’abord » a permis de sortir de la rue 280 000 personnes durant le quinquennat. Un bémol cependant pour la Fondation Abbé Pierre : la démarche est inégalement implantée et reste pour l’instant du domaine de l’expérimentation. Elle mériterait, selon la Fondation, d’être généralisée.
De plus, le gouvernement a investi 2 milliards d’euros dans l’hébergement d'urgence, ce qui a permis de créer 200.000 nouvelles places durant le quinquennat. « Mais une part très importante de l'hébergement d'urgence est liée à la situation d'immigration », a précisé Emmanuel Macron, dont le mandat a aussi été émaillé de polémiques sur le traitement réservé aux migrants, notamment avec le démantèlement régulier des camps de Calais et Grand Synthe.
200 000 places d'hébergement d'urgence ont été créées en 5 ans.
Emmanuel Macron salué sur la rénovation énergétique
Côté construction, l’exécutif affiche un bilan positif : 2,2 millions de nouveaux logements durant le quinquennat, soit 100.000 de plus que sous François Hollande. Un bilan d’autant plus favorable que la crise sanitaire et le report des élections municipales ont pesé sur la délivrance des permis de construire par les communes.
Autre avancée du quinquennat : la rénovation énergétique. MaPrimeRénov’ a été lancée par la ministre du Logement Emmanuelle Wargon afin de regrouper toutes les aides sous un programme unique et d’en simplifier la compréhension ainsi que les démarches. Résultat prometteur : 4,5 fois plus d’aides ont été accordées en 2021 par rapport à l’année précédente, pour un total de 372 828 primes payées à l'issue du chantier (soit 2,06 milliards d’euros). D’autant que le dispositif a bénéficié à plus de 60 % à des ménages modestes, ce qui est en adéquation avec l’objectif du gouvernement d’en finir avec les passoires thermiques. Si les chiffres restent toutefois moins importants qu'escomptés, Valérie Mancret-Taylor, directrice générale de l'Anah (Agence nationale de l'habitat), précise que « ce chiffre relativement modeste par rapport au volume (du nombre de logements à rénover, NDLR) monte en puissance chaque année. »
MaPrimeRénov' a bénéficié à 60 % aux ménages modestes.
Le président sortant joue la carte de la continuité
Logiquement, le programme d’Emmanuel Macron pour le prochain mandat s’inscrit dans la continuité de son bilan. Aucune grande mesure d’envergure n’a, en effet, été annoncée… « Il n’y a pas de révolution », a même prévenu Xavier Lépine, l’expert logement de la campagne du président sortant, dans un entretien au Monde. Quelle sera donc son ambition ? Accélérer ce qui a déjà été fait.
Ainsi, d’un cap de 500 000 logements rénovés par an, on passe à 700 000. Aux professionnels de la construction, qui semblent avoir du mal à s’adapter aux nouvelles exigences environnementales comme la RE2020, le président-candidat promet de ne pas appliquer de nouvelles normes de construction pour son éventuel prochain mandat. Autre ambition qui devrait être poursuivie : la suppression de la taxe d’habitation, pour 4 Français sur 5.
Emmanuel Macron promet aussi dans son projet présidentiel « d’étendre la caution solidaire aux locataires (Garantie Visale, NDLR) afin de faciliter l’accès au logement tout en sanctionnant les mauvais payeurs », sans toutefois préciser comment ce dispositif sera élargi.
Un objectif de 700.000 logements rénovés par an pour le prochain mandat.
Immobilier : les points clés du programme d'Emmanuel Macron
Impayés de loyers, fiscalité, travaux de rénovation… Voici l'essentiel des mesures du candidat Macron pour l'immobilier :
- Rénovation énergétique - Rénovation de quelque 700 000 logements chaque année.
- Travaux - Création d’une Prime Adapt’ couvrant « selon les ressources, jusqu’à 70% du montant des travaux d’adaptation » des logements des seniors afin qu'ils puissent continuer de vivre chez eux sera instaurée.
- Fiscalité - Exonération des successions directes jusqu'à150 000 €. Les transmissions en ligne indirecte (enfants du conjoints, neveux/nièces…) feront l'objet d'une exonération à hauteur de 100 000 €.
- Location - Extension du domaine d'application de la garantie Visale afin de « lutter contre les discriminations dans le logement » et de protéger les propriétaires contre les loyers impayés. La garantie Visale couvrira non seulement les jeunes de moins de 30 ans mais aussi les salariés du privé gagnant moins de 1 500 € net.
- Versement automatique des APL (dont la réduction avait été vivement critiquée).
Logement : Marine Le Pen affiche un programme ambitieux
Comme pour le président sortant, le logement ne semble pas être la priorité de Marine Le Pen. En revanche, pour faire face au bilan d’Emmanuel Macron, la candidate du Rassemblement National mise avant tout sur le développement du logement social. Elle propose, en effet, de construire 100 000 logements sociaux par an, dont 20.000 en faveur des étudiants et des jeunes travailleurs. Leur accès serait régi par la « préférence nationale ». De plus, Marine Le Pen envisage la suppression de la loi SRU sur le logement social, qui impose notamment un quota de 20 à 25 % de logements sociaux par commune de plus de 1 500 habitants. La candidate d’extrême droite compte également supprimer les aides au logement pour les étrangers.
Pour favoriser l’accession immobilière des jeunes couples français (dont la moyenne d’âge doit être inférieure à 30 ans), Marine Le Pen propose une mesure ambitieuse : la mise en place d’un prêt à taux zéro jusqu’à 100 000 € dont le capital restant à rembourser sera supprimé dès la naissance du 3e enfant. Le but du dispositif : booster la natalité.
La candidate du Rassemblement National propose une autre mesure incitative : faire passer de 100 000 à 300 000 € l’abattement fiscal sur la transmission des biens immobiliers. Elle veut également aligner le régime fiscal des donations de grands-parents à petits-enfants sur le modèle des donations parents-enfants, c'est-à-dire une exonération des droits de succession à hauteur de 100 000 € tous les 10 ans par parent et par enfant. Marine Le Pen indique également vouloir supprimer l'impôt sur la fortune immobilière et le remplacer par un impôt sur la fortune financière. Ce dernier exclurait alors du calcul la résidence principale et les outils de production (usines…).
Immobilier : les points clés du programme de Marine Le Pen
Travaux, fiscalité, accession à la propriété… On vous résume ce qu'a prévu Marine Le Pen :
- Travaux de rénovation - Lancement d’un « plan de réhabilitation de l’habitat ancien grâce à des aides efficaces ».
- Fiscalité - Remplacement de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) par un impôt sur la fortune financière. Réduction de l'impôt sur les successions en excluant du calcul les biens immobiliers à hauteur de 300 000 €. Alignement du régime fiscal des donations des grands-parents à leurs petits-enfants sur celui des parents à leurs enfants.
- Accession à la propriété - Mise en place des crédits immobiliers au-delà de 25 ans. Instauration d’un prêt public à taux zéro sur dix ans, réservé aux jeunes couples d’un montant maximum de 100 000 euros et dont le capital restant dû sera effacé dès la naissance du troisième enfant. Ce prêt sera réservé aux couples dont l'un des deux membres a la nationalité française et dont l'âge moyen est inférieur à 30 ans.
- Logements sociaux - Construction de 100 000 logements sociaux par an dont 20 000 seront réservés aux étudiants et aux jeunes travailleurs. Remise sur le marché de 620 000 logements sociaux réservés aux Français. « Priorité nationale » donnée aux « foyers dont au moins l’un des parents est français ». Suppression des aides au logement pour les étrangers.
- Location et impayés - Mise en place d’un Fonds de Garantie des Loyers pour protéger les propriétaires.
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