En pleine cinquième vague, les locataires se sentent fragilisés et s’inquiètent quant à leur capacité à payer leur loyer. Les bailleurs doivent rester à l’écoute. SeLoger fait le point.
La peur de ne pas pouvoir payer son loyer gagne du terrain dans l’esprit des locataires selon le dernier Observatoire du Moral Immobilier SeLoger, réalisé en collaboration avec Opinionway, fin 2021, auprès de plus de 1500 locataires et bailleurs.
La pression monte chez les locataires !
Selon la dernière vague de l’Observatoire du Moral Immobilier SeLoger, réalisée en collaboration avec OpinionWay(1), ces derniers recommencent à être inquiets sur leur capacité à payer leur loyer (+9 pts par rapport à mai 2021, après une baisse de -6 pts entre février et mai 2021). C’est tout d’abord la hausse du coût de la vie (+2,8 % sur un an à novembre 2021(2)) et en conséquence, la baisse de leur pouvoir d’achat(3) qui expliquent ces inquiétudes.
Toutefois, les locataires ne remettent pas en cause le montant de leur loyer, puisque deux tiers des sondés jugent son montant réaliste et cette tendance dure depuis des mois. Autre inquiétude : le niveau des revenus des locataires, pas toujours en adéquation avec le niveau de leur loyer (pour 52 % des sondés inquiets). Enfin, la dernière source d’inquiétude concerne une éventuelle augmentation des prix des loyers (51 % des locataires inquiets).
Si l’anxiété grimpe chez les locataires, alors que les bailleurs sont plutôt sereins (70 % des sondés), c’est parce que la crise sanitaire a déstabilisé des ménages qui étaient jusqu’à présent à l’abri de la problématique de l’impayé de loyer. « Les restrictions de déplacements ont pu générer des difficultés économiques pour les ménages, estime Louis du Merle, directeur juridique de l’Agence nationale pour l'information sur le logement.
Avec la crise sanitaire, le sujet des impayés de loyer touche un public qui était inconnu ou méconnu des acteurs habituels de la prévention des expulsions. Je pense par exemple aux restaurateurs, artisans, chefs d’entreprises, indépendants... » L’Anil a donc réactivé la plateforme « SOS Loyers Impayés » et mis en place un baromètre dédié au nombre de consultations en Agences départementales de l’information sur le logement (Adil) relatives aux impayés de loyers. « Chaque année, nous observons traditionnellement une hausse des consultations autour de l’entrée et de la sortie de la trêve hivernale. Et même si actuellement, nous sommes revenus aux niveaux de 2019, ceux d’avant crise donc, notre vigilance est très élevée depuis le premier confinement de mars 2020 », poursuit Louis du Merle.
L’étude montre que la crainte de ne pas pouvoir régler son loyer est bien présente chez plus d’1 locataire sur 5. Inversement, côté bailleurs, c’est la sérénité qui s’intensifie. Une dichotomie de regards qui peut surprendre à l’heure où la question du pouvoir d’achat préoccupe les ménages, résume Séverine Amate, porte-parole chez SeLoger.
Les bailleurs doivent se protéger contre les impayés de loyer
La vigilance doit également être de mise du côté des bailleurs ! D’abord, en optant pour un outil visant à se protéger contre l’impayé de loyer. Ils sont 54 % à avoir souscrit à un dispositif, nous apprend l’étude réalisée par OpinionWay pour SeLoger. Il s’agit-là d’une proportion stable au fil des mois.
Parmi les souscriptions envisagées, la Garantie Loyers Impayés (GLI) arrive en tête des dispositifs étudiés (38 %), notamment parmi ceux qui sont inquiets quant au paiement des loyers (51 %). La GLI est suivie de près par la garantie Visale (16%) déployée par Action Logement. La garantie Visale, « n’est pas toujours bien connue, alors qu’elle fonctionne très bien et est particulièrement facile d’utilisation », juge Arnaud Hacquart, président-fondateur d’Imodirect, une agence immobilière 100 % en ligne dédiée à l’activité de recherche de locataires et de gestion locative. Seulement 49 % des bailleurs interrogés connaissent Visale selon l’étude SeLoger, un dispositif gratuit qui a pourtant permis de sécuriser près de 600 000 ménages à fin décembre 2021 selon Action Logement Groupe.
Autre manière de se protéger : la caution physique. Près de deux tiers des bailleurs en demandent une, indique l’étude SeLoger. 73 % des bailleurs qui demandent des cautions personne physique n’en demandent qu’une seule, et 21 % en demandent au moins deux (une tendance similaire à février 2020, avant la crise sanitaire donc). « Le recours à un garant physique n’est pas une garantie à 100 %, pour les deux parties. Plusieurs cas de figure sont possibles, prévient Arnaud Hacquart. Le garant peut décider de ne pas payer (en cas de différend avec le locataire) ou peut être devenu insolvable. Il est également de plus en plus courant de voir des dossiers garants falsifiés. » Selon le gouvernement, le taux d’impayés de loyer est de l’ordre de 1 %. Notons que dans les faits, seuls 20 % des bailleurs ayant été confrontés à des impayés ont déjà eu recours aux cautions personne physique pour régler les dettes de leurs locataires, fait savoir l’étude SeLoger.
En cas d’impayés, réagir vite et s’entourer
Et lorsqu’un bailleur doit faire face à un impayé de loyer, il est important de réagir vite. « Plus on agit tôt, plus la problématique sera facile à résoudre, estime Louis du Merle. Le risque est l’accumulation des dettes locatives, à un point tel que le locataire ne puisse pas résorber ou échelonner sur 12, 24 ou 36 mois ces sommes. » En complément, il faut renouer le contact que l’on soit bailleur ou locataire. « Le bailleur doit essayer de comprendre pourquoi son locataire est en situation d’impayé de loyer : est-ce lié à une difficulté conjoncturelle (par exemple, une baisse des ressources) ou un accident de la vie (par exemple, une séparation) ? En savoir plus lui permettra d’adopter la bonne attitude et orienter le locataire pour l’accompagner vers le bon acteur pour sortir de cette période difficile », poursuit-il.
Dernier conseil de l’expert juridique : se tourner vers les Agences départementales de l’information sur le logement (Adil) car les aides mobilisables sont assez diverses. « Il existe des aides publiques nationales, mais aussi locales, octroyées par les fonds de solidarité logement (FSL), les métropoles, les communes, ou encore les associations, explique Louis du Merle. Il est important d’avoir un contact local via l’ADIL de son département, car ces juristes de proximité ont une connaissance très fine des acteurs locaux et des aides mobilisables sur leur territoire. Par exemple, le règlement des FSL, qui conditionne l’octroi d’aides publiques, diffère selon les départements ».
Comment fonctionne la garantie Visale ?
Visale garantit gratuitement 36 mois de loyer sur l’ensemble de la durée d’occupation du bail dans le parc privé, elle couvre également le risque de détérioration à hauteur de 2 mois de loyer, en plus du dépôt de garantie. « Et nous nous occupons de la procédure à mettre en place et supportons les coûts associés », poursuit Jérôme Drunat. Pour obtenir un contrat de cautionnement, rien de plus simple : locataire et bailleur doivent créer un compte personnel sur le site visale.fr. Le locataire obtient ainsi son « visa » qu’il glisse dans son dossier de location. S’il est choisi par un bailleur, ce dernier devra également ouvrir son compte personnel afin d’obtenir son contrat de cautionnement. « En cas d’impayé de loyer d’un mois, le bailleur se rend sur son compte personnel pour le déclarer. Les équipes de Visale contactent le propriétaire bailleur dans les deux jours et le paiement est effectué dans le mois suivant la déclaration, afin d’indemniser les deux mois impayés. C’est très rapide au regard d’autres pratiques du marché. 95% des bailleurs usagers de Visale sont satisfaits du dispositif. 73 % des locataires usagers ont déjà recommandé Visale ».
La visale pour qui ?
« Nous octroyons la garantie Visale aux moins de trente ans – qui peuvent y avoir recours sans condition de statut professionnel – et ceux qui ont plus de 30 ans révolu, sous conditions(5), explique Jérôme Drunat, directeur général de l’APAGL, l’association en charge de Visale chez Action Logement Groupe. Lorsqu’un ménage est composé de plusieurs personnes, il suffit que l’une d’entre elles réponde à ces critères pour que l’ensemble du ménage soit éligible à Visale. Nous avons également des critères sur les loyers(6). L’ensemble de ces critères relèvent d’une démarche de discrimination positive, souhaitée par les partenaires sociaux d’Action Logement, afin d’accompagner les locataires qui ont le moins de chance d’être sélectionnés par les bailleurs, parce qu’ils sont en CDD par exemple, ou parce que leur taux d’effort (jusqu'à 50 %) est plus élevé que la plupart des candidats à la location dans le parc locatif privé (en général, les bailleurs fixent une limite à 33 %). L’idée étant de modifier petit à petit les critères de sélection des bailleurs ».
Annotation :
- Etude réalisée par OpinionWay pour le compte de SeLoger du 26 octobre au 9 novembre 2021 auprès de plus de 1500 locataires et bailleurs (905 locataires et 665 bailleurs). Données faisant l’objet d’un redressement à partir de données de cadrage.
- Source Insee – Indice des prix à la consommation
- Raison invoquée par 74% des locataires se disant inquiets sur leur capacité à régler leur loyer
- Pour les plus de 30 ans révolus : les salariés du secteur privé et du secteur agricole sans CDI confirmé, qui sont en situation de double mobilité (changement d’emploi et de logement), ceux qui ont signé un bail mobilité créé par la loi Elan, ceux qui sont en mutation professionnelle ou qui perçoivent moins de 1 500 € net mensuel de salaire (quel que soit le contrat de travail, y compris les CDI), peuvent bénéficier de la garantie Visale.
- Ces derniers ne doivent pas dépasser 1 500 € charges comprises en Îe-de-France, 1 300 € ailleurs et pour les étudiants de moins de 30 ans révolus sans ressources, le loyer ne peut pas excéder 800 € en Île-de-France et 600 € dans le reste de la France.
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