Depuis que le gouvernement a décidé de faire la chasse aux passoires thermiques, le DPE est un critère d'achat auquel les Français attachent de plus en plus d'importance. À tel point que la performance énergétique des biens impacte désormais leur valeur… sauf sur les marchés les plus tendus, comme à Paris. On vous dit pourquoi.
Qu’est-ce que la loi Climat et Résilience a changé ?
Adoptée le 4 mai 2021, la loi Climat et Résilience a pour but de renforcer la lutte contre le dérèglement climatique dans de nombreux domaines, notamment l’immobilier. En effet, ce secteur est responsable de 30 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre et consomme environ 40 % de l’énergie mondiale. Or, le gouvernement s’est fixé l’objectif ambitieux d’atteindre la neutralité carbone en 2050… Il fallait donc qu'il se mette au travail. Sa première cible : les passoires thermiques. Selon les chiffres du ministère de la Transition énergétique et les récents travaux de Yassine Abdelouadoud dans son étude sur le nombre de passoires énergétiques en France, il y aurait entre 4,9 et 7 millions de passoires énergétiques sur les 27 millions de logements que compte la France.
La loi Climat et Résilience a frappé un grand coup : elle interdit progressivement la location des passoires thermiques, c'est-à-dire des biens ayant un mauvais DPE (diagnostic de performance énergétique). Voici les dates à retenir :
- 1er janvier 2023 : interdiction de louer les biens dont le DPE est classé G, pour ceux dont la consommation est supérieure à 450 kWh/m²/an.
- 1er janvier 2025 : interdiction pour tous les biens classés G.
- 1er janvier 2028 : interdiction pour tous les biens classés F.
- 1er janvier 2034 : interdiction de louer les biens classés E.
Face à cette pression sur les investisseurs locatifs, particulièrement dans les marchés tendus, le ministère du Logement a lancé MaPrimeRénov. Ce dispositif de l'État vient en aide à tous les propriétaires, bailleurs comme locataires. Elle permet de financer, en moyenne, la moitié des travaux de rénovation et cela peut même monter jusqu'à à 90 % pour les ménages les plus modestes. Distribuée par l’Anah (Agence nationale de l’habitat), elle entre dans le cadre de France Rénov, le nouveau service public qui vise à accompagner tous les Français dans l’amélioration de leur situation énergétique.
Boom des mises en vente des passoires énergétiques à Paris
Malgré cet accompagnement accru, le nombre de passoires thermiques (DPE G et F) en vente sur le marché immobilier a bondi en 2021, notamment à Paris. Selon une étude menée par Meilleurs Agents et SeLoger, la hausse des mises en vente s’élève à + 8 % pour les appartements étiquetés F ou G au niveau national en 2021 (contre + 3,5% pour les biens A,B,C,D et E). En revanche, cette hausse (pour les F/G) atteint + 34,3 % à Paris (contre + 12,8% pour les biens A,B,C,D et E) ! Cela est dû notamment à l’architecture parisienne. En effet, le passé haussmannien et les immeubles anciens de la capitale française traduisent un nombre bien plus élevé de passoires thermiques dans Paris intra muros qu’ailleurs. Et pour cause : la moitié du parc immobilier parisien date d’avant 1945 !
Autre raison de cet écart important entre Paris et le reste de la France sur les volumes de mises en vente des passoires thermiques : l’investissement locatif. Il est de fait bien plus prégnant dans la capitale, où la part de propriétaires-occupants n’est que de 33,3 % contre 57,5 % dans le reste du pays. Deux dynamiques récentes favorisent encore davantage cette hausse des mises en vente des passoires énergétiques : l’encadrement des loyers mis en place à Paris, qui pèse sur les velléités de location et la crise sanitaire qui a donné aux Français des envies de grand air, loin de la vie parisienne.
Pas d’écart significatif sur les prix dans la capitale
Si les annonces immobilières regorgent de passoires thermiques, Paris évite les différences de prix observées ailleurs. En effet, au niveau national, les appartements classés F et G subissent une décote de 13 % par rapport aux biens classés A et B. Pourtant, à Paris, ces appartements énergivores restent en moyenne 1,1 % plus chers que les biens plus performants (C, D et E) ! Cela tient, notamment, aux critères de recherche des Parisiens : l'emplacement et le charme de l’ancien favorisent des biens moins récents et donc moins bien classés.
Cela ne vaut, cependant, pas pour la petite et la grande couronne… Dans ces zones, le prestige des bâtiments anciens n’a pas autant cours et le marché est moins tendu. De plus, le nombre de passoires thermiques sur l’ensemble du parc immobilier est moins élevé. En conséquence, on retrouve en banlieue parisienne la même dynamique qu’ailleurs : en moyenne, les passoires thermiques subissent une décote de - 0,6 % en petite couronne et de - 5,9 % en grande couronne (par rapport au biens C,D et E). Ainsi, plus l'on s’éloigne de Paris, plus l’impact du DPE sur les prix de vente est significatif.
Les passoires thermiques (appartements classés F et G) sont moins chères en banlieue parisienne : - 0,6 % en petite couronne et - 5,9 % en grande couronne (par rapport au biens C,D et E).
À Paris, le prix des passoires thermiques baisse plus vite
Bonne nouvelle, en revanche : le prix des appartements « passoires thermiques » baisse plus vite que les autres appartements à Paris. En effet, si le prix de l’immobilier a baissé à Paris, en 2021, tous les biens ne sont pas logés à la même enseigne. Ainsi, si au cours des 6 derniers mois le prix des biens classés de A à E recule de 1,6 %, celui des biens F et G baisse de 3,9 % ! Plus impressionnant encore, sur 1 an, les prix des biens classés de A à E sont en baisse de seulement 0,2 %, contre - 4,2 % pour les passoires thermiques ! De quoi donner envie d’acheter un bien à rénover dans Paris…
À Paris, le prix des passoires thermiques (appartements) est plus élevé que celui des biens performants, mais il baisse aussi plus vite.
Sources : SeLoger / Meilleurs Agents
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