14.8 milliards d’euros annuels : c’est le manque à gagner dans le budget des collectivités locales depuis la suppression de la taxe d’habitation. La question de son rétablissement revient sur la table à l’occasion des débats parlementaires sur le projet de loi de finances de 2025. Décryptage.
La suppression de la taxe d’habitation : un gain de pouvoir d’achat pour les Français
Emmanuel Macron l’avait promis en 2017 : la taxe d’habitation disparaîtrait progressivement du paysage fiscal, pour rendre du pouvoir d’achat aux Français. Objectif atteint, puisque selon Jean-René Cazeneuve, ex-rapporteur général du budget, le gain s’est élevé à 642 euros par ménage.
Cet impôt local était par ailleurs considéré comme injuste, car il ne reposait pas sur la valeur du bien, mais dépendait plutôt du lieu de résidence. C’est ainsi que des villes comme Nanterre ou Puteaux, qui ont sur leur territoire le quartier de la Défense et récoltent des recettes conséquentes des entreprises, pouvaient appliquer une taxe plus faible.
Entre 2018 et 2023, la taxe d’habitation sera donc allégée, puis supprimée, au grand dam des élus locaux. En effet, lors de sa dernière année pleine, en 2017, elle avait rapporté 22,3 milliards, dont 14.8 milliards étaient revenus aux communes. Le manque à gagner des collectivités territoriales fait l’objet depuis d’une compensation versée par l’État… Qui a creusé le déficit national d’environ 20 milliards d’euros.
À savoir : la taxe d’habitation reste due sur les résidences secondaires suffisamment meublées pour être habitables et sur leurs dépendances.
5 milliards d’euros d’économie demandés aux collectivités territoriales
La discussion sur le retour de la taxe d’habitation revient dans l’Hémicycle alors que le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de demander un effort de 5 milliards d’euros aux collectivités territoriales. Une mesure qui risque de mettre encore plus à mal l’équilibre budgétaire des départements, déjà particulièrement inquiétant.
Comme l’explique Charles de Courson, rapporteur général de la Commission des finances, lors de la session ordinaire de l'Assemblée nationale du 24 octobre dernier, “14 départements sont en déficit de fonctionnement en 2024 et, selon les projections de Départements de France, 29 le seront en 2025 et une cinquantaine en 2027", précise-t-il.
Jean-François Copé, maire de Meaux, estime quant à lui que la suppression de la taxe d’habitation a été "la grande erreur du quinquennat (…). Si l’on doit recréer un impôt, c’est celui-là". Cette nouvelle taxe permettrait notamment de supprimer l'économie demandée aux collectivités du projet de loi de finances 2025.
Les pistes pour une nouvelle taxe
Alors, la taxe d’habitation ressuscitera-t-elle en 2025 ? La Ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation, Catherine Vautrin, balaie l’idée d’un revers de main. Mais elle laisse la porte ouverte à la discussion, car il semble injuste que le financement des services publics locaux repose uniquement sur les propriétaires, alors que les locataires en profitent tout autant. « Il faut réfléchir à une participation possible au fait de vivre dans la ville ou le village. Il n’y a rien de gratuit. (...)", souligne-t-elle.
Plusieurs hypothèses sont dans les tuyaux. Jean-François Copé évoque une “taxe sur la résidence”, qui fusionnerait taxe foncière et taxe d’habitation. Elle concernerait les propriétaires et les locataires, à l’exception des plus modestes.
Autre possibilité, l’impôt résidentiel défendu par le président de l’Association des maires de France, David Lisnard. Il l’imagine en plusieurs strates : "un impôt résidentiel, qui soit au niveau des mairies, du bloc communal, un impôt économique qui soit au niveau des intercommunalités, etc".
Une troisième voie se dessine : un nouvel impôt communal calculé en fonction des revenus et qui s’appliquerait à tous, comme le soutient Bertrand Hauchecorne, maire de Mareau-aux-Prés.
Mais la piste la plus probable reste l’augmentation des droits de mutation à titre ordinaire (DMTO). Autrement dit, des frais de notaire. Une mesure qui pèserait donc uniquement sur les nouveaux acheteurs, dans un contexte où la reprise du marché immobilier reste fragile. Est-ce la solution qui sera retenue ? Affaire à suivre…
Pouvez-vous nous préciser pourquoi ? (facultatif)