Acheter un bien immobilier en « nature », est-ce possible ?

Florian Billaud 12 mar 2015
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La loi Française interdit de payer l'intégralité d'un bien immobilier en « nature ». En revanche, avec ce mode de paiement, il est possible d'en financer une partie. Explications.

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Acheter un bien immobilier en « nature », est-ce possible ?
Un arrêt de la Cour de Cassation de janvier 2015 met en avant que le paiement partiel en « nature » est envisageable, si il a une valeur réelle. © luzulee
Sommaire

Le paiement en « nature » n'est pas encadré par la loi

Lors de la signature de l'acte authentique de vente, chez le notaire, le paiement du bien immobilier s'effectue soit par voie de virement bancaire soit par chèque (en règle générale un chèque bancaire). Le paiement s'effectue en intégralité. Il n'est cependant pas exclu d'avoir recours à d'autres types de paiements à la seule et unique condition que ces derniers aient une valeur réelle aux yeux de l'administration fiscale. Un échange de biens, une vente en viager ou une cession de créance sont autant de moyens de paiement partiels ou totaux quantifiables.

La crainte du législateur est bien évidemment la dissimulation fiscale. A contrario, le propre d'un conseiller juridique, d'un avocat ou d'un notaire est d'informer son client et de le conseiller afin qu'il optimise ses transactions immobilières tout en respectant le cadre légal. Optimiser un achat immobilier est légal, faire une donation l'est tout autant ; en revanche, le paiement en nature d'un bien immobilier n'est pas encadré par la loi. On pourrait dès lors considérer qu'il y a vide juridique et que par conséquent, ce qui n'est pas prévu par la loi est légal sauf que l'achat doit se manifester par un paiement ayant une valeur réelle et par conséquent quantifiable, évaluable. La question de droit qui se pose est la manière d'évaluer, d'estimer un paiement en nature. C'est en ce sens que le législateur et l'administration fiscale sont très méfiants par rapport à la pratique de ce type de paiement.

Bon à savoir

Il serait faux de penser qu'on peut payer en nature l'intégralité d'un bien immobilier. Ce n'est pas le cas. On ne s'exonère jamais entièrement d'un paiement monétaire (ou autre comme indiqué ci-dessus) ; s'y soustraire sera perçu comme une forme de fraude fiscale, ce qui en droit pénal est une infraction délictuelle passible d'une amende et d'une peine d'emprisonnement. La vente immobilière passe nécessairement par voie notariale. En d'autres termes, une vente immobilière incluant un paiement intégral en nature doit être refusée par le notaire. 

La jurisprudence semble manifester plus de souplesse

Un arrêt datant de janvier 2015 rendu par la Cour de Cassation a cassé la décision d'une Cour d'Appel qui avait donné raison au Trésor Public qui suspectait les neveux d'un oncle défunt d'avoir bénéficié d'une donation immobilière et non d'une vente. Un paiement aménagé est envisageable lors d'une opération immobilière à condition qu'elle ait une valeur réelle. Dans le cas visé par la jurisprudence du 6 janvier 2015, un prêt initial avait été effectué pour l'achat du bien immobilier mais qui ne couvrait pas l'intégralité de l'achat. Une partie du paiement devait être effectuée par voie de soins prodigués par les neveux à leur oncle sachant que ce dernier leur avait restitué le montant du prêt avant son décès. C'est la raison pour laquelle le Trésor Public a cru percevoir une forme de donation déguisée. La Cour de Cassation a estimé que la Cour d'Appel n'avait pas apporté suffisamment d'éléments probants quant à la non réalisation des soins prodigués. Implicitement, la Cour de Cassation reconnaît qu'un paiement partiel, dans le cas de l'affaire jugée, est justifiable. Il ne faut toutefois pas considérer que cette jurisprudence s'appliquera à toutes les affaires similaires et susceptibles d'être jugées par une juridiction civile. Cette décision ne s'applique que pour le cas jugé le 6 janvier 2015.

Le paiement en nature pour une transaction immobilière n'est pas la norme. Si la loi ne la reconnaît pas explicitement, la jurisprudence semble manifester davantage de souplesse mais elle ne concerne qu'un seul cas jugé. Si le consentement éclairé des parties à la vente est une condition essentielle pour le transfert de propriété, il n'en demeure pas moins que la preuve constitue la meilleure garantie aux yeux de la loi française. C'est la preuve qui fera que le Trésor Public ne suspectera pas de donation déguisée.

Les points clés à retenir

  • En droit français, la preuve est fondamentale ; on peut partiellement payer en nature un bien immobilier à condition de pouvoir le prouver.
  • Il ne faut pas confondre législation et jurisprudence : la loi est généraliste et encadre tandis que la jurisprudence tranche un cas précis. Ce qui est valable pour une affaire ne le sera pas forcément pour une autre.
  • Le paiement en nature, s'il est mal effectué, peut être considéré comme une forme de dissimulation fiscale et peut générer une enquête de l'administration fiscale.
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