Encadrement des loyers : 30 % des annonces hors des clous

Blandine Rochelle
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L’encadrement des loyers, dispositif instauré pour limiter les abus tarifaires et protéger le pouvoir d’achat des locataires, montre des limites préoccupantes : près d’un tiers des annonces publiées dans les communes concernées dépassent encore les plafonds autorisés. Cette situation, révélée par le 5ᵉ baromètre de la Fondation pour le logement, met en lumière les zones de non-conformité persistantes malgré l’effet modérateur du dispositif.

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Vue aérienne de la ville de Paris
À Paris, 31 % des annonces dépassent encore les plafonds de l'encadrement des loyers. ©GettyImages
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Encadrement des loyers : un dispositif qui patine

Onze ans après sa mise en place, l’encadrement des loyers est toujours loin d’être respecté. Près d’un tiers des annonces publiées dans les villes où le dispositif s’applique dépassent toujours les plafonds légaux. C’est le constat dressé par le 5ᵉ baromètre de la Fondation pour le logement, publié début septembre. Sur les 70 communes concernées, 32 % des annonces ne respectent pas la loi, soit une progression de 4 points en un an.

Cet outil, instauré pour freiner la flambée des loyers dans les zones tendues, devait permettre aux ménages de souffler un peu. Pourtant, la réalité montre que la règle est davantage l’exception que la norme dans certains territoires…

Paris : des loyers toujours au sommet

Dans la capitale, le dispositif existe depuis 2015, mais les résultats restent décevants : 31 % des annonces dépassent encore les plafonds, malgré une timide amélioration par rapport aux 35 % relevés en 2021.

L’addition est surtout lourde pour les locataires : le dépassement moyen atteint 237 € par mois, soit plus de 2 800 € par an. C’est bien au-dessus de la moyenne nationale, fixée à 192 €. Dans une ville déjà réputée pour sa cherté, le respect partiel du plafonnement ne suffit donc pas à rétablir un équilibre.

Des écarts criants entre les villes

L’étude montre également que la situation varie fortement selon les territoires. À Montpellier, seuls 12 % des loyers dépassent les plafonds, ce qui fait de la ville la bonne élève du classement. La proportion grimpe à 31 % à Lille et à 45 % à Grenoble, nouvelle venue dans le dispositif. Même constat au Pays basque, où 38 % des loyers s’envolent au-dessus de la limite.

C’est en Seine-Saint-Denis, dans l’intercommunalité de Plaine Commune, que le dérapage est le plus marqué : près de 6 annonces sur 10 (59 %) sont hors des clous ! Un chiffre jugé « inquiétant » par la Fondation pour le logement, tant il reflète la difficulté à faire appliquer la loi dans certains territoires.

32 % des annonces dépassent les plafonds autorisés dans les communes appliquant l’encadrement des loyers.

Petits logements et passoires thermiques en première ligne

L’encadrement semble d’autant plus fragile lorsqu’il s’agit de logements modestes ou énergivores. Les studios de 10 m² ou moins affichent un record : 91 % d'entre eux sont proposés à un loyer supérieur à la limite autorisée. Une situation qui touche particulièrement les étudiants et jeunes actifs, premiers concernés par ce type de surfaces.

Autre constat : les logements classés G, dits « passoires thermiques », sont largement concernés, avec 38 % d’annonces qui ne respectent pas les règles d’encadrement. Pourtant, la loi interdit toute majoration de loyer sur ces biens. En pratique, cette règle est largement ignorée.

Une expérimentation sous pression

Prévu par la loi Alur de 2014 et rendu possible par la loi Elan de 2018, l’encadrement des loyers reste un dispositif expérimental. Il doit en principe s’arrêter en novembre 2026, mais face aux résultats contrastés obtenus, la Fondation pour le logement plaide pour son maintien et son renforcement.

« L’encadrement conduit à une modération réelle des loyers et redonne du pouvoir d’achat aux ménages », insiste Christophe Robert, délégué général de la Fondation. Il appelle toutefois à sortir d’une logique où « le contrôle repose uniquement sur les épaules des locataires ». La Fondation pour le logement demande un élargissement du dispositif à toutes les villes volontaires, ainsi qu’un durcissement des sanctions pour les bailleurs récalcitrants.

Entre effet modérateur et résistance du marché

Malgré ses limites, l’encadrement n’est pas sans impact : dans les zones où il s’applique, les loyers progressent moins vite qu’ailleurs. Cependant, la persistance de pratiques illégales – notamment sur les petites surfaces et dans les secteurs les plus tendus – montre que l’arsenal actuel reste insuffisant.

Alors que la crise du logement s’intensifie, le débat sur la pérennisation et le renforcement du dispositif ne fait que commencer. Entre propriétaires qui dénoncent une atteinte à la rentabilité et associations qui réclament plus de contrôles, la bataille autour du logement abordable est loin d’être terminée.

À noter qu’un logement peut dépasser les plafonds prévus par la loi, sans être dans l'illégalité, dans la mesure où un complément de loyer est autorisé lorsque le logement possède des atouts particuliers.

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