L'année 2023 a marqué un tournant difficile pour les agents immobiliers, sévèrement touchés par la crise du secteur. La situation s'est rapidement dégradée, avec une augmentation significative des faillites d'agences et une baisse de moral parmi les professionnels. Face à ces défis, les agents immobiliers ont récemment demandé au Conseil d’État une révision à la hausse des frais d'agence, une démarche qui pourrait entraîner des conséquences importantes pour les locataires.
Une crise marquée par une vague de faillites d'agences
Entre mai 2023 et avril 2024, 1 120 agences immobilières ont fait faillite, soit deux fois plus que l'année précédente, selon les données de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM). Cette hausse spectaculaire des fermetures est un indicateur clair de la crise profonde qui secoue le secteur immobilier. La situation économique des agences a conduit les professionnels à déposer un recours devant le Conseil d'État pour demander une augmentation des honoraires de location.
Les honoraires d'agence sont actuellement plafonnés par la loi Alur de 2014, qui prévoit des tarifs différenciés selon la localisation du bien :
- 8 €/m² en zone détendue.
- 10 €/m² en zone tendue.
- 12 €/m² en zone très tendue.
- Les frais pour l'état des lieux sont fixés à 3 €/m².
Cependant, ces plafonds n'ont jamais été révisés depuis leur mise en place, il y a 10 ans, malgré une disposition légale permettant une révision annuelle.
Les agents immobiliers demandent une revalorisation des honoraires
Pour compenser presque une décennie de gel des tarifs et faire face à la crise qui s’étend à un nombre croissant d’agences, les agents immobiliers ont réclamé une hausse de +13,75 % de leurs honoraires. Si cette augmentation est acceptée, un locataire à Paris pourrait, à titre d’exemple, voir les frais d'agence pour un appartement de 50 m² passer de 750 à 853 €, soit une augmentation de plus de 100 €. Autre exemple : pour un appartement de 50 m² à Bordeaux, situé en zone tendue, les frais d'agence pourraient passer de 650 à 740 €, état des lieux compris. Guillaume Martinaud, président de la coopérative Orpi, a défendu cette demande, en soulignant que ces honoraires constituent une rémunération pour un travail réalisé et qu'ils doivent être ajustés pour refléter l'inflation et l'augmentation des coûts opérationnels des agences.
La FNAIM et d'autres syndicats professionnels expliquent que cette hausse est essentielle pour la survie économique des agences. La situation actuelle, où les coûts de fonctionnement ont augmenté sans ajustement des honoraires, met en effet les agences dans une position difficile. Sans cette revalorisation, de nombreuses autres agences pourraient suivre le même chemin que celles qui ont déjà fait faillite.
Le nombre d’agences ayant fait faillite a augmenté de +114 % en un an, selon les chiffres de la FNAIM.
Un marché locatif en forte tension
Cette demande de hausse intervient dans un contexte de marché locatif particulièrement tendu. Une étude menée par SeLoger rappelait il y a quelques mois que le nombre de biens disponibles à la location avait diminué de -36 % en 2 ans à fin 2023. Cette pénurie de locations disponibles complique la recherche d'un logement pour de nombreux locataires, notamment les étudiants et les jeunes travailleurs. SeLoger a ainsi mis en évidence des pénuries dans plusieurs villes françaises, aggravant encore les difficultés pour ceux qui cherchent un logement.
La loi Climat et Résilience a également ajouté de nouvelles contraintes pour les propriétaires, rendant la location de certains biens plus complexe et augmentant le coût d'entretien des logements. De plus, les conditions d'octroi de prêts se sont durcies et les taux d'intérêt ont augmenté. Cela a contribué à une baisse historique de près de 20 % des ventes immobilières en 2023. Cette conjonction de facteurs pousse les locataires à rester plus longtemps dans leur logement actuel, ce qui réduit le turnover et accentue la pression sur le marché locatif.
L'avenir des frais d'agence : la décision du Conseil d’État attendue
Il faudra attendre la décision du Conseil d'État pour savoir si la hausse des frais d'agence sera validée, et si oui, à quel montant et à partir de quand elle pourrait entrer en vigueur. Les syndicats immobiliers, tels que l'UNIS, la FNAIM et le SNPI, espèrent obtenir cet ajustement qu'ils jugent essentiel pour la viabilité de leur profession. Actuellement, les frais d'agence sont jugés trop bas pour couvrir les coûts de leur activité, d'autant plus que la révision annuelle des honoraires prévue par la loi Alur n'a jamais été mise en œuvre.
La hausse demandée pourrait donc permettre à de nombreuses agences de survivre dans un contexte économique difficile. En revanche, une telle augmentation pourrait peser lourd sur les nouveaux locataires, déjà confrontés à des loyers élevés et à une hausse générale du coût de la vie.
La FNAIM craint encore près de 1 400 faillites d’agences immobilières en 2024.
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