Crise du logement : il faut accélérer la transformation de bureaux en habitat

Diana Jones
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La France compte 4,1 millions de personnes mal-logées, selon le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre. La transformation de bureaux en logements pourrait permettre d’accroître l’offre de logements, à condition de lever les freins pointés par SeLoger.

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Un immeuble de bureaux
Sur le parc francilien de bureaux, 3,3 millions de m² seraient dès lors inutilisés. © GettyImages
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Flambée des loyers et des recherches de location

Et si la transformation de bureaux en logements pouvait contribuer à résoudre la crise du logement en France ? Selon la Fondation Abbé Pierre, qui a dévoilé son 27e rapport sur l’Etat du mal-logement en France, le 24 janvier dernier, la crise est prégnante. Quelque 4,1 millions de personnes sont en situation de mal-logement en France et la crise sanitaire accroît les tensions.

Transformer les bureaux en logements

La transformation de bureaux en logements est une solution sérieuse, car les planètes s’alignent les unes après les unes. D’abord, le marché lui-même produit des espaces à restructurer. « Le parc francilien de bureaux (le plus important de France, NDLR) se constitue d’environ 55 millions de m², dont 4 à 5 millions de m² vacants, commence Alexandre Chirier, président de la foncière de transformation immobilière, filiale du groupe Action Logement. Il faut ajouter à ces espaces une somme de bureaux mal occupés, qui ne font pas l’objet d’investissement de la part des propriétaires et qui entreront sous peu dans le marché de la vacance, le produit tertiaire étant par définition très obsolescent. » 

Ensuite, depuis l’émergence de la crise sanitaire, le recours massif du télétravail pousse les entreprises à revoir leur empreinte immobilière. Selon ses simulations, l’Institut de l’épargne immobilière et foncière (IEIF) estime, par exemple, que si 41 % des entreprises passent à 2 jours de télétravail chaque semaine, le gain de surface envisageable pour chaque société serait de 27 %. Sur le parc francilien de bureaux, 3,3 millions de m² seraient dès lors inutilisés. Conscient des enjeux, le gouvernement a octroyé un coup de pouce aux collectivités locales pour les inciter à accompagner le mouvement. Dans le cadre de France Relance, les maires, qui accordent un permis de construire de transformation de bureaux en logements, bénéficient de l’aide à la relance de la construction durable bonifiée de 50 % (soit 150/m² au-dessus d’un certain seuil de densité défini dans chaque territoire).

Enfin, l’objectif de zéro artificialisation nette fixé à 2050 par la loi Climat et Résilience et la mise en place d’une comptabilité carbone dans le cadre de la Réglementation Environnementale 2020 (afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre), orientent les grands opérateurs à reconstruire la ville sur la ville. Selon la Fédération des Sociétés Immobilières et Foncières (FSIF), la rénovation d’un immeuble par rapport à sa démolition-reconstruction représente un gain en termes de bilan carbone estimé entre  200 et 300 tonnes pour un immeuble de 1000 m² ! « De grandes foncières, dont certaines ont un savoir-faire important en matière d’immobilier résidentiel, accélèrent la reconversion d’une partie de leur patrimoine », observe Vincent Bollaert, CEO France de Knight Frank France. C’est le cas, par exemple, d’Icade, qui mène une opération portant sur la transformation d’un immeuble tertiaire d’environ 16 000 m² en logements. En décembre dernier, la filiale de la Caisse des Dépôts a lancé à l’occasion du Simi, « AfterWork by Icade », une démarche compilant des outils d’aide à la décision afin d’identifier les scénarios de transformation les plus pertinents.

Encore de nombreux freins à lever

Il faut dire que les porteurs de projets ont besoin d’aide, car les opérations de transformation de bureaux en logements relèvent parfois du chemin de croix. « Parmi les freins à leur développement, je note les freins politiques - il faut obtenir le consensus des élus locaux et nous n’intervenons sur un territoire qu’à cette condition-, fiscaux - la fiscalité qui s’applique au marché tertiaire diffère de celle qui s’applique au logement-, techniques -liés à la structure des bâtiments, ce qui peut compromettre les projets de transformation- ou encore économiques », énumère Alexandre Chirier, qui a en portefeuille 180 000 m² de bureaux acquis ou en cours d’acquisition, pour une production d’environ 4 700 logements. 

Les bilans sont difficiles à équilibrer car le mécanisme de valorisation des immeubles de bureaux n’est pas le même que celui des logements. Les immeubles de bureaux à transformer sont valorisés en fonction des niveaux de loyer qu’ils peuvent potentiellement générer, même s’ils sont vides ou sous-occupés, alors que le logement est valorisé en fonction de la surface habitable à développer. « Cela signifie que le prix d’acquisition des immeubles à transformer est souvent plus élevé que la valeur des logements à développer et cela plombe les bilans des développeurs », conclut Alexandre Chirier. La transformation de bureaux en logements a donc de beaux jours devant elle, à condition de réussir à équilibrer les opérations.

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