Comment se porte le marché de la construction en France ? Quel est son avenir ? On en parle avec David Costarigot, responsable marketing France pour le réseau Maisons Arlogis, constructeur de maisons, pour le podcast de SeLoger l’immobilier décrypté.
Comment choisir son terrain pour son projet de construction ?
Pour choisir un terrain constructible pour sa future maison, il y a certains critères qui peuvent paraître indispensables et essentiels aux familles à l’instant T mais qui ne sont pas forcément les vrais critères prioritaires. Je m’explique : pour moi il faut d’abord savoir s’il y a des terrains disponibles sur la zone souhaitée, car s’il n’y en a pas on ne peut pas les inventer, si le prix est bien en adéquation avec le projet et si non est-on prêt à faire des concessions en terme de surface ? Aujourd’hui, un lotissement c’est 400 ou 500 m2 et rarement plus, donc c’est sûr que si l’on rêve à une maison avec 2 000m2 de terrain ce n’est pas possible, à moins de chercher en campagne à plus d’une heure de route d’une grande ville.
Pour les familles, les critères prioritaires sont plutôt la proximité avec le travail, l’école, les grands-parents, la nounou... car ce sont leurs préoccupations au moment où ils font construire mais ils oublient qu’ils ne vont pas forcément passer toute leur vie dans la même entreprise, que leur enfant va changer d’école puis peut-être de ville pour ses études, donc ils n’auront pas forcément besoin d’être expressément à côté de l’école maternelle ou élémentaire où est leur enfant à ce moment là. Il vaut donc mieux essayer de se placer sur des grands axes afin que le logement soit surtout facilement accessible.
Comment choisir son constructeur ?
D’abord il faut rappeler que l’État a fait quelque chose de très bien en mettant en place les contrats de construction de maisons individuelles (CCMI) car cela encadre le métier de constructeur. Tous les constructeurs ne l’ont pas mais ceux qui l’ont doivent remplir des obligations vis-à-vis des particuliers : des obligations de résultats, de prix, de délais, d’assurances… et si vous ne passez pas par un constructeur CCMIste alors ce sera à vous de gérer les problèmes qui peuvent survenir sur le chantier, de gérer les artisans et je ne crois pas que l’on ai vraiment envie de s’occuper de ça quand on fait construire sa maison. Pour moi le premier critère est donc de voir si le constructeur vous propose un CCMI.
Ensuite, il faut faire attention à l’ancienneté du constructeur. Dans les métiers du bâtiment les projets sont souvent sur le long terme donc ça rassure de savoir que les entreprises ont 10, 20 ans d’activité derrière elles… Ce n’est pas un gage absolu ni une réponse parfaite mais on se dit qu’il y a plus de chances qu’elle soit encore là dans 10 ans (qui est la durée de la garantie décennale) qu’une entreprise qui existe depuis deux ans. Peut-être que ce sera le cas, mais peut-être pas…
Autre point auquel on ne pense pas forcément : tous les constructeurs ont un style différent alors il faut bien regarder le type de maison (régionale, moderne, cubique…) afin que cela réponde à vos attentes. Pour le vérifier rien de plus simple : demandez à voir des maisons. Ne vous contentez pas de photos, un constructeur n’a rien à cacher s’il est fier de son boulot, alors n’hésitez pas à lui demander de visiter des maisons déjà réalisées. Cela vous permettra aussi de discuter avec les propriétaires pour savoir s’ils sont contents de la maison, comment s’est passé le chantier, la relation avec le constructeur…
Dernier point, je dirais les avis clients. Non pas que ce n’est pas important mais c’est difficile de faire la part des choses pour identifier les avis des vrais clients. Il faut aussi ajouter qu’une personne mécontente essayera de le faire savoir de tous les côtés et mettra un avis négatif mais pourra aussi demander à ses amis, sa famille de mettre des avis négatifs. Donc un client mécontent peut laisser 20 ou 30 mauvais commentaires, alors qu’un client content c’est normal, le constructeur a fait son job donc il ne laissera peut être pas d’avis ou en mettra un seul. C’est pour ça qu’il vaut mieux éviter de se baser uniquement sur les avis clients.
Passer par un CCMI assure un suivi constructeur et des garanties réglementaires.
Peut-on bénéficier du Pinel pour une maison individuelle ?
Techniquement, on peut utiliser le dispositif Pinel pour les maisons individuelles, mais en pratique c’est très compliqué à mettre en place pour différentes raisons. D’abord, le Pinel est réservé aux zones avec une forte tension immobilière. S’il y a une tension immobilière, c’est qu’il n’y a pas assez de logements pour répondre à la demande et s’il n’y a pas assez de logements c’est qu’à priori il n’y a pas de terrain, ni pour des maisons ni pour faire des immeubles. C’est donc difficile de trouver un terrain et un jour s'il y en a un, la maire sera plus prompte à y faire construire un immeuble collectif qu’une maison, qui ne peut accueillir qu’un ménage. De plus, le Pinel sur les maisons individuelles est limité par un certain nombre d’obligations :
- 300 000 € d’investissement par an.
- Répartis sur deux projets maximum.
- Plafonnés à 5 500 € du m2.
C’est ce plafonnement qui pose problème au niveau de la maison individuelle : trouver un terrain et faire construire pour moins de 5 500 € du mètre carré, c’est très difficile. Si vous dépassez ce plafonnement, la réduction fiscale sera moins intéressante car elle ne s’effectuera que sur les premiers 5 500 € par m2 d'autant que si le Pinel a été reconduit jusqu'à fin 2023, c’est avec des avantages fiscaux revus à la baisse. On économise donc moins sur ses impôts que par le passé. On perd facilement 2 à 3 % par an selon la durée du Pinel.
Attention, il faut avoir déposé son permis de construire avant le 31 décembre 2020 pour pouvoir bénéficier du Pinel sur une maison individuelle.
Quelles sont les garanties constructeur qui protègent les particuliers ?
Les garanties d’un constructeur CCMIste sont régies par la loi d’ordre public du 19 décembre 1990. Une loi d’ordre public signifie qu’on ne peut pas y déroger contractuellement, c’est-à-dire qu’au moment du contrat le constructeur s’engage à en respecter toutes les dispositions, notamment les garanties obligatoires.
La première des garanties est la garantie de livraison au prix et délais convenus. Donc dans le contrat sont indiqués le prix de la maison et le délai auquel elle doit être livrée. Ce dernier peut cependant être revu en cas d’intempéries (comme de fortes chaleurs ou de froid inhabituel) mais selon des normes strictes : il y a un nombre de jours de retard prévus pour chaque situation, c’est très encadré. Ensuite, il y a la garantie de parfait achèvement. Elle suppose que durant un an vous aurez la possibilité de faire corriger, réparer, finir des choses qui ne conviennent pas et que vous aurez signifié au moment de la remise des clés ou par écrit dans l’année qui suit la livraison.
La troisième garantie est la garantie biennale. Elle assure le bon fonctionnement du bien immobilier. Cela est, notamment, lié aux équipements de la maison : chaudière, VMC… Ils sont tous garantis pendant deux ans. En cas de problème, le constructeur est chargé de les réparer ou de les changer si nécessaire. La dernière est sans doute la plus connue : c’est la garantie décennale. Elle démarre également à la remise des clés et vous couvre en cas de problème structurel de la maison pendant 10 ans. Cela comprend tout ce qui rend le bien impropre à son utilisation, c’est-à-dire que si vous ne pouvez plus vivre dans la maison le constructeur doit intervenir.
4 garanties obligatoires protègent les acheteurs
- La garantie de livraison au prix et délais convenus.
- La garantie de parfait achèvement.
- La garantie biennale.
- La garantie décennale.
Quelle est votre vision du marché de la construction sur 10 ans ?
C’est une question compliquée car il est déjà très difficile de donner une vision sur quelques semaines du marché de la construction, mais si je devais me prononcer, je dirais quand même deux choses. D’abord, la maison neuve sera encore plus, aujourd’hui, un bien d’exception, quelque chose qui sera réservé à quelques ménages qui auront la capacité de faire un emprunt immobilier ou auront beaucoup d’épargne et à condition qu’on trouve un terrain. Donc ça va devenir rare et encore plus compliqué de faire construire sa maison individuelle. Le rêve des jeunes familles, qui se lancent dans la vie active et prévoient de faire des enfants, devra sans doute attendre quelques années avant de se concrétiser.
La deuxième chose, c’est qu’avec les dernières évolutions écologiques, comme les économies d’énergie qui sont une bonne chose au demeurant, on va se retrouver à devoir faire des maisons en cubes qui se ressembleront toutes, sans distinctions régionales. C’est quelque chose que je regrette car dupliquer quarante fois la même maison n’est pas passionnant pour nous, d’autant que nous réalisons du sur-mesure et surtout il faut se mettre à la place du client. La famille qui arrive après avoir économisé, avec son petit dessin et nous dit « voilà j’ai déjà pensé à mon plan de maison, j’aimerais bien ceci, celà... » mais à qui on devra dire non on ne peut pas, on ne peut faire qu’un cube. Donc que ce soit pour les familles ou pour nous, j’espère que ça pourra évoluer dans une autre direction que celle-ci car personnellement je ne rêve pas du tout de lotissements à l’américaine avec 50 à 100 fois la même maison.
Pouvez-vous nous préciser pourquoi ? (facultatif)