Le placement vert permet d’épargner en ayant pour objectif que ce placement encourage des causes vertueuses d’un point de vue social ou environnemental. Guillaume Sommerer, auteur du livre « Placements verts, mythes et réalités », décrit ce placement porteur, ses avantages et les points de vigilance qui s’imposent.
Quelle est la définition du placement vert ?
Guillaume Sommerer. Un placement vert est un placement qui permet aux épargnants de placer leur argent dans des causes vertueuses. Ce placement peut être vertueux pour l’environnement par exemple et son impact postitif va se traduire dans des faits sociaux, comme placer son argent dans des entreprises qui ont des pratiques sociales vertueuses ou des pratiques de gouvernance en interne vis-à-vis des salariés, telles que des politiques salariales d’inclusion, de respect de l’égalité homme-femme, etc. Les placements verts sont donc des placements responsables, qui permettent d’épargner tout en soutenant des pratiques les plus vertueuses possibles, c’est faire de l’argent un instrument au service de la société. On peut trouver des placements financiers, mais également des placements immobiliers.
Les Français souhaitent-ils investir de façon responsable ?
Oui clairement, car 90 % des Français affirment dans tous les sondages qu’ils souhaitent investir de façon plus responsable et vertueuse possible. Si beaucoup le disent, seuls 5 % des Français le concrétisent réellement, mais ils le font de plus. L’an dernier, 300 milliards d’euros étaient investis par les Français dans des fonds labellisés socialement responsables. Ce type de placement monte en puissance car l’offre est de plus en plus importante et les millenials qui représentent la génération des 20 à 30 ans, sont particulièrement sensibles aux enjeux environnementaux : ce sont les clients de demain dans la gestion du patrimoine, ce sont les futurs clients dans l’immobilier et ces causes leur tiennent particulièrement à cœur.
Quels sont les labels qui existent en matière de placement vert ?
Pour investir de façon responsable, il faut avoir les moyens de vérifier que l’argent que l’on confie à un gérant ou à un spécialiste de l’immobilier va être utilisé de façon véritablement vertueuse. Pour cela, il existe des jalons qui sont les labels. Par exemple, le label « Investissement Socialement Responsable », (ISR), vous garantit que les fonds dans lesquels vous investissez sont régulièrement contrôlés par des organismes d’audit, des experts indépendants. Ces fonds sont contrôlés tous les 3 ans de sorte que vos placements auront un impact le plus positif possible. Un autre label, le label Greenfin vous garantit que vous n’investirez ni dans le nucléaire, ni dans le charbon, par exemple.
Ces labels sont utiles et nécessaires mais ils sont encore imparfaits, car lorsque vous investissez dans le label Greenfin, vous allez passer à côté de certaines entreprises qui tentent d’améliorer leurs pratiques dans ce domaine. Cela implique donc d’exclure certains domaines et l’ennui c’est que certaines entreprises ne poursuivront pas leurs efforts sans incitation financière, si l’on ne vient pas récompenser ces efforts. C’est le bémol de cette stratégie qui vise à investir dans des fonds les plus parfaits possibles : premièrement, ils ne le sont pas et deuxièmement, cela empêche un certain nombre de sociétés qui ne sont pas éligibles de réaliser des efforts d’amélioration de leurs pratiques.
De même, le label ISR vous apporte, certes, un certain nombre de garanties sur l’utilisation vertueuse de votre argent, mais ce label présente certaines limites comme sur le volet social. Vous arriverez à mesurer l’impact environnemental de votre placement, mais c’est plus difficile de mesurer l’impact social de l’utilisation de votre argent.
Fin 2019, les encours des unités de compte responsables, vertes et solidaires en assurance-vie s’élevaient à près de 25 milliards d’euros contre 7 milliards à fin 2018.
Source : enquête de la FFA (Fédération française de l’assurance).
Quelles sont les différentes façons d’investir responsable dans la pierre ?
Tout d’abord, il faut rappeler que la pierre est le secteur qui émet le plus de CO2 en France. 25 % de ces émissions proviennent de l’habitat, donc si vous investissez vertueux à travers des placements et que votre logement pollue énormément, c’est bien dommage. Ce qui compte c’est donc de choisir des investissements dans la pierre qui contribuent à changer les choses. On relève d’ailleurs un label qui s’applique à l’immobilier et qui garantit que les biens dans lesquels vous allez investir consomment moins d’eau, moins d’électricité. Il existe aussi des SCPI qui commencent à obtenir le label et il faut souligner que ces SCPI sont rentables, pour joindre l’utile à l’agréable. Dans la pierre, on a également le dispositif Pinel qui contribue à améliorer les choses, car nous vivons une crise du logement et qu’il faut construire. De plus, il permet de loger des familles modestes car les locataires doivent avoir des loyers plafonnés qui sont assez bas. Enfin, vous luttez contre l’étalement urbain car le Pinel est interdit pour les maisons. On peut aussi parler de la conversion de bureaux en logement qui pourrait s’accélérer avec l’essor du télétravail. Chacun chez soi peut également agir en engageant une rénovation énergétique qui permet de réduire l'impact sur l'environnement.
« Le dispostif Pinel est une solution concrète pour réaliser un placement vertueux dans la pierre »
Guillaume Sommerer
Investir responsable est-ce que c’est rentable ?
Ce n’est pas parce que vous investissez vertueux que tout cela sera rentable, mais beaucoup d’outils apportent des preuves de rentabilité, comme les SCPI labellisées « socialement responsables ». Certaines ont rapporté en 2020 entre 4 et 6 % malgré la crise. Donc on peut faire de l’éthique et du rentable, il est possible d’obtenir les deux.
Quelles sont les réticences des épargnants dans le fait d’investir dans des placements verts ?
Les réticences viennent de la question de savoir s’il s’agit de greenwashing, une espèce d’argument marketing pour attirer le chaland. Ça existe, il y a une part de greenwashing, mais aujourd’hui nous avons de plus en plus d’outils pour vous assurer que vos placements seront réellement vertueux. Un certain nombre de notations permet de mesurer le degré d’engagement dans lequel investir. L’autre question que se posent les particuliers c’est de savoir s’il s’agit d’une bulle sur les actifs verts, car on voit en bourse des valeurs qui ont gagné, en quelques mois à peine, jusqu’à 600 %. Donc il y a sans doute une bulle sur certaines valeurs mais la thématique est la bonne et nous observons de vrais poids lourds qui profitent de cette vague et sur lesquels vous pouvez investir. Puis il est conseillé de diversifier ses placements, de ne pas choisir une seule société.
Une autre question que se posent les investisseurs, c’est de savoir si ceux qui leur distribuent des produits verts sont compétents pour le faire. Est-ce qu’un banquier a vraiment été formé aux enjeux environnementaux, est-ce qu’il est légitime ? C’est vrai que ce monde doit encore se constituer, il est donc important de vérifier les frais lorsque l’on vous propose un produit vert. Il faut rechercher l’expertise, or l’expertise engendre des frais supplémentaires et il faut que la banque vous propose autre chose que les produits issus de son management et également des produits ouverts sur l’ensemble du marché.
En 2019, l’épargne verte a permis d’accueillir 1 360 personnes dans des logements et hébergements sociaux et équiper en électricité 25 155 foyers.
Source : 18e Baromètre de la finance solidaire 2020 présenté par Finansol et La Croix.
A l’image du nouveau DPE et de MaPrimeRénov’, qui aident les propriétaires à rénover énergétiquement leur logement, existe-t-il une réglementation ou des avantages qui incitent les épargnants à réaliser un placement vert ?
Il y a des réglementations notamment européennes de plus en plus importantes, puis la loi PACTE qui oblige les géants de l’assurance vie à proposer au moins une unité de compte positive, solidaire, qui rentre dans une démarche socialement responsable. Une nouvelle norme RE2020 concerne les acteurs du neuf. Les chantiers de construction devront dans les prochaines années baisser les émissions de CO2 de 30 %. Les établissements publics, qui aménagent des quartiers entiers, doivent laisser de la place pour la nature, pour des espaces verts qui doivent constituer au moins 20 % des nouveaux quartiers et ils doivent être composés à 50 % de matériaux biosourcés : la paille, le chanvre, la terre cuite, le bois. Donc on voit, qu’en effet, il y aura de plus en plus d’offres vertueuses et les épargnants seront incités à la privilégier.
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