Peut-on s’approprier un bien immobilier ?

Blandine Rochelle 08 mar 2019
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Aussi étrange que cela puisse paraître, il est possible de s’approprier le bien immobilier d’une autre personne en se comportant comme le véritable propriétaire aux yeux de tous durant au moins 30 ans. C’est la prescription acquisitive, et les juges de la Cour de Cassation confirment régulièrement ce principe.

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Peut-on s’approprier un bien immobilier ?
Pour invoquer la prescription acquisitive, le propriétaire réel ne doit pas s'être manifesté durant tout le temps de l'utilisation du bien par un tiers. © Christian Schwier
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On peut s’approprier un bien immobilier en se comportant comme le propriétaire

Récemment, un arrêt de la Cour de Cassation est venu rappeler que l’on peut s’approprier un bien immobilier qui ne nous appartient pas, même si l’on est de mauvaise foi et qu’on a conscience qu’il ne nous appartient pas. Il suffit en effet d’occuper les lieux et de se comporter durant 30 ans comme le propriétaire et le bénéficiaire, ce qui permet de profiter de la prescription acquisitive. Elle permet d’acquérir un bien ou un droit par l’effet de la possession, comme l’explique le Code civil et celui qui en bénéficie n’a pas besoin de prouver sa propriété par un titre juridique, et personne ne peut contester sa propriété en invoquant sa mauvaise foi. La loi accorde la propriété d'un bien immobilier à une personne, à partir du moment où la « possession est continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire. »

Un homme a pu s’approprier un terrain par simple effet de possession

L’arrêt, qui a confirmé l’effet de la prescription acquisitive, concernait un conflit qui opposait deux frères, dont l’un des deux tentait de s’approprier un morceau de terrain appartenant à l’autre, et qui savait pertinemment qu’il avait tort. Cela l’empêchait de se dire occupant des lieux depuis 30 ans, à titre de propriétaire. Mais les juges de la Cour de Cassation ont estimé que la notion d’occupant à titre de propriétaire était à juger aux yeux des tiers. Or, le fait que l’un des frères sache que la parcelle ne lui appartenait pas ne l’empêchait pas de se comporter comme s’il en était propriétaire. Cet homme a donc bénéficié de la prescription acquisitive et a été considéré comme le propriétaire du morceau de terrain, malgré l'absence de titre de propriété, et malgré sa mauvaise foi.

Références juridiques

  • Cass. Civ 3, 20.12.2018, C 17-28.107

Attention, il faut se méfier de la prescription acquisitive

En principe, la notion de propriété repose sur des règles strictes qui supposent notamment un titre de propriété. Mais la prescription acquisitive est une exception à ce principe, puisqu’en vertu de cette règle, un propriétaire peut se voir déchu de sa propriété, si une ou plusieurs personnes usent de son bien et se comportent comme le(s) propriétaire(s) à l’égard du bien durant un certain temps, même sans détenir de titre. Cependant, pour que la prescription acquisitive soit validée par les juges, l’utilisateur du bien doit s’en servir au vu et au su de tous, et non pas de façon clandestine ou équivoque. De plus, le véritable propriétaire du bien ne doit pas s’être manifesté pendant tout le temps durant lequel son bien était utilisé par d’autres personnes. Les propriétaires sont donc incités à faire ce qu’ils peuvent pour le rester et à faire valoir leurs droits. Notez que la prescription acquisitive est de 30 ans, ce qui signifie qu’une personne usant d’un bien ne lui appartenant pas mais se comportant comme tel, peut devenir le propriétaire légal à l’issue de 30 ans.

Bon à savoir

La prescription acquisitive peut être de 10 ans si le tiers parvient à prouver qu’il y a eu transfert de propriété du propriétaire initial à l’acquéreur, ou bien si l’acquéreur démontre l’existence d’un acte juridique qui lui a été transmis et qui stipule qu’il est le propriétaire du bien. Ce délai s’applique également aux acquéreurs considérés comme étant de bonne foi. L’acquéreur doit donc prouver qu’il a cru conclure un transfert de propriété du bien avec le propriétaire, ou qu’il pensait sincèrement être le véritable propriétaire du bien.

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