La commune peut-elle imposer la cession gratuite d’un terrain au titulaire d’un permis de construire ?

Morgane Jacquet 02 sep 2020
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Vous souhaitez déposer un permis de construire et vous vous demandez si la collectivité peut imposer la cession gratuite d’une partie de votre terrain en contrepartie de la délivrance de l’autorisation de construire ? Si oui, cet article est pour vous.

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La commune peut-elle imposer la cession gratuite d’un terrain au titulaire d’un permis de construire ?
Aucune cession gratuite de terrain par un bénéficiaire d’une autorisation d’urbanisme au profit d’une collectivité locale n’est désormais possible. © Hanna
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La cession gratuite d’un terrain était possible, mais a été supprimée !

Une commune pouvait imposer au propriétaire de lui céder gratuitement une part du terrain, pour l’affecter à certains usages publics. Le Conseil constitutionnel a déclaré cette faculté contraire à la Constitution.

Dans son article 72-1-1, la loi n° 67-1235 d’orientation foncière du 30 décembre 1967 permettait aux communes d’assortir un permis de construire de la cession gratuite, par un propriétaire, d’une partie de son terrain, afin de l’affecter à certains usages collectifs. La cession s’imposait alors au moment où le bénéficiaire commençait à entreprendre les travaux. Attention cette possibilité de cession ne concernait pas la construction des maisons individuelles.

Par suite conformément à l’article L 332-6-1-2 e) du code de l’urbanisme, la parcelle cédée ne pouvait pas avoir une superficie supérieure à 10 % de la surface de terrain sur laquelle devait être édifiée la construction pour laquelle avait été demandé le permis de construire ou l’autorisation de lotir. Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité par la Cour de Cassation, le Conseil constitutionnel a abrogé la disposition litigieuse estimant qu’elle contrevenait notamment au principe de l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, aux termes duquel la propriété est « un droit inviolable et sacré ». Une personne peut en être privée seulement lorsque la nécessité publique l’exige, et à condition de recevoir une indemnité « juste et préalable ».

Or, la loi de 1967 prévoyait une cession gratuite, sans indemnisation. En outre, le texte ne définissait pas les usages publics auxquels les terrains cédés devaient être affectés, et il laissait à la collectivité le plus large pouvoir d’appréciation de cette disposition. Par la suite, aucun texte n’est venu instituer des garanties permettant d’éviter qu’il ne soit porté atteinte à l’article 17. Le Conseil constitutionnel a donc considéré qu’en adoptant cette disposition, le législateur avait méconnu l’étendue de sa compétence.

Les conséquences de la suppression de la cession gratuite de terrains

La décision d’inconstitutionnalité de l’article L.332-6-1, 2° e du Code de l’urbanisme, relatif aux cessions gratuites de terrains, a pris effet à compter de la publication de la décision au « Journal officiel », soit le 23 septembre 2010. Les conséquences sont les suivantes :

  1. Aucune cession gratuite ne peut plus être prescrite dans les autorisations délivrées à partir de cette date.
  2. Les cessions gratuites déjà prescrites et qui n’ont pas encore fait l’objet d’un transfert de propriété ne peuvent plus être mises en œuvre. Les terrains doivent donc être achetés par la collectivité aux propriétaires fonciers après avis du service des domaines, soit par voie amiable, soit par voie d’expropriation.
  3. Les terrains, dont le transfert a été constaté par un acte authentique transmis, après signature des parties intéressées, au conservateur des hypothèques en vue de la publicité foncière, antérieurement à la décision d’inconstitutionnalité, ne sont pas concernés.

Cette décision d’inconstitutionnalité peut affecter les pratiques des collectivités locales. Néanmoins, la taxe d’aménagement, entrée en vigueur le 1er mars 2012, permet aux collectivités d’appliquer des taux différenciés selon les secteurs de la commune, en fonction du coût des dépenses d’équipements engendrées par l’urbanisation. Le taux déterminé pouvant être porté jusque 20 % par délibération motivée si la commune doit équiper substantiellement un secteur donné, notamment en matière de voirie. En contrepartie, les participations ne sont plus exigibles dans ce secteur.

Par conséquent, la commune ne dispose plus de dispositions législatives et a fortiori de procédure lui permettant d'exiger la cession gratuite de la bande de terrain au bénéficiaire du permis de construire.

  • Art. L 332-6-1-2 e) du code de l’urbanisme
  • Circulaire du 2 novembre 2010 relative à l’inconstitutionnalité de la cession gratuite de terrain
  • Question écrite n° 19954 de M. Jean Louis Masson publiée dans le JO Sénat du 11/02/2016
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