Dégâts liés aux violences urbaines : quel impact sur les permis de construire ?

Morgane Jacquet
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À la suite des émeutes du 27 juin au 5 juillet 2023, le gouvernement a introduit de nombreuses évolutions dans le droit de l'urbanisme. Quelles sont ces dernières et quelles conséquences sur les permis de construire ?

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une femme et un homme de dos en tenue de chantier
Quatre évolutions majeures sur le permis de construire concernant les dégâts liés aux violences urbaines.
Sommaire

Un droit à la reconstruction renforcé et élargi

La première évolution majeure est une importante dérogation à l’article L111-15 du code de l’urbanisme. En effet, l'ordonnance permet désormais la reconstruction d’un bâtiment même dans les cas où les documents d’urbanisme en vigueur (carte communale, PLU..) n’autoriseraient plus une telle construction et ce, à la seule condition que ces bâtiments aient été régulièrement édifiés, c’est-à-dire à condition qu’ils aient bien été autorisés précédemment par une autorisation d’urbanisme.

Cette ordonnance permet également de déroger au principe selon lequel la reconstruction doit impérativement être à “l’identique”. En effet, elle autorise toute sortes d’adaptations, que ce soit une diminution ou une augmentation de la construction initiale, à condition que le gabarit du bâtiment ne subisse pas de modification supérieure à 5 % de son gabarit d'origine et que cela n'entraîne pas un changement de destination ou de sous-destination du bâtiment. Ces modifications doivent toutefois faire l’objet d’une motivation spécifique dans la demande d’autorisation d’urbanisme.

L’ordonnance rappelle toutefois que ces exceptions ne sauraient déroger aux règles applicables en matière de risques naturels, technologiques ou miniers auxquels la reconstruction ou la réfection ne peut contrevenir et, le cas échéant, sous réserve des prescriptions de sécurité dont l'autorité compétente peut assortir le permis.

Un début anticipé des travaux dès le dépôt de la demande de reconstruction

La deuxième évolution apportée par l’ordonnance consiste à autoriser l’engagement des opérations et travaux de démolition, de terrassement et de fondation des bâtiments en question dès le dépôt de la demande ou de la déclaration préalable, et ce, sans attendre l’autorisation de la part du service instructeur. 

Le maire doit procéder, dans les meilleurs délais et pendant toute la durée de l'instruction, à l'affichage en mairie ou à la publication par voie électronique, sur le site internet de la commune, d'un avis de dépôt de demande de permis ou de déclaration préalable précisant les caractéristiques essentielles du projet.

Le récépissé de dépôt de la demande doit également être affiché sans délai sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins du demandeur.

Une accélération drastique des délais d’instruction

La troisième évolution mise en place par l’ordonnance consiste en une diminution du délai d’instruction et notamment dans les cas de majoration d’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme. En effet, lorsque  la délivrance de l'autorisation d'urbanisme est subordonnée au recueil préalable de l'avis, de l'accord ou de l'autorisation d'un organisme ou d'une autorité administrative telle que l'Architecte des Bâtiments de France (ABF), l'autorité compétente lui transmet un exemplaire du dossier, dans les cinq jours suivant sa réception.

Les majorations ou prolongations du délai d'instruction de la demande d'urbanisme découlant de l'application de règles de délivrance prévues par d'autres législations que celle de l'urbanisme sont limitées à quinze jours à compter de la réception du dossier par l'organisme ou l'autorité administrative concerné. Le cas échéant, la majoration ou la prolongation du délai d'instruction est notifiée sans délai au demandeur.

Dans les cas où la réalisation des travaux est subordonnée à l'accomplissement préalable d'une procédure de participation du public selon les modalités prévues à l'article L123-19 du code de l'environnement, la majoration du délai d'instruction est limitée à 45 jours.

Le délai d’instruction des demandes d’autorisation par les organismes ou autorités administratives sollicités par le service instructeur est également réduit. En effet, les avis, accords ou autorisations requis sont adressés à l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme dans un délai de quinze jours à compter de la réception du dossier. Nonobstant toute disposition contraire, le silence gardé passé ce délai vaut, selon le cas, avis favorable ou acceptation tacite. 

En revanche, lorsque ces avis, accords ou autorisations sont émis par un organisme collégial, celui-ci statue dans les plus brefs délais et par tout moyen assurant l'identification des participants et le respect de la confidentialité des débats vis-à-vis des tiers, nonobstant toute disposition particulière le régissant.

Un assouplissement des démarches administratives préalables

La quatrième évolution de l'ordonnance permet à l’autorité compétente en matière d’instruction d’urbanisme, lorsque la réalisation des travaux requiert l'accomplissement préalable d'une procédure de participation du public, de recourir à la procédure de participation par voie électronique prévue à l'article L123-19 du code de l'environnement et exempter le projet d'enquête publique. Cette dérogation permet ainsi d'assouplir les conditions de consultation et de participation au public en limitant, à 30 jours minimums, les possibilités pour ces derniers de se manifester par des observations et/ou des propositions sur des projets requérant, en l’état du droit commun, la mise en place d’une enquête publique complète.

L’ordonnance en question n’est applicable que pour les bâtiments régulièrement édifiés et ayant subi des dégradations au cours des 27 juin et 5 juillet 2023, et ce, uniquement pour les demandes d'autorisation d'urbanisme déposées dans les dix-huit mois à compter de son entrée en vigueur.

Références juridiques

  • LOI n° 2023-656 du 25 juillet 2023 relative à l'accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023 (1)
  • Ordonnance n° 2023-870 du 13 septembre 2023 tendant à l'accélération de la délivrance et la mise en œuvre des autorisations d'urbanisme permettant la reconstruction et la réfection des bâtiments dégradés au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023
  • Code de l’urbanisme : article L111-15
  • Code de l’environnement : article L123-19
  • Circulaire relative à l'accélération des procédures pour faciliter les opérations de réparation ou de reconstruction suite aux dégradations intervenues dans certaines zones urbaines
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