Meublés touristiques : ce que prévoit le projet de loi « anti-Airbnb »

Laetitia Lapiana
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Réduction de la niche fiscale, durcissement de la réglementation, exigences de décence énergétique, DPE obligatoire, pouvoir des élus locaux renforcé... Définitivement adopté par le Sénat, le projet de loi « anti-Airbnb » apporte un sérieux coup de frein au développement effréné de la location meublée touristique, et à ses dérives spéculatives, afin de corriger les déséquilibres du marché locatif. Une réponse très attendue face à la crise du logement et à la pression foncière qui sévit dans les zones tendues et les territoires à forte affluence touristique. Explications.

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projet de loi anti-airbnb
Adopté par le Sénat, le projet de loi « anti-Airbnb » devrait entrer en vigueur avant la fin de l'été. @ Getty
Sommaire

Des règles plus strictes pour les locations touristiques

Adoptée à l’unanimité (fait rare !) le 21 mai dernier en première lecture, la proposition de loi « visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif » se donne pour objectif de mieux encadrer la location de meublés touristiques, en passant par une régulation renforcée du marché et par une réduction « dissuasive » de sa fiscalité. Communément appelée « loi anti-Airbnb », la future loi Le Meur — du nom de la députée Renaissance corapporteure du texte — entend cibler les potentiels spéculateurs, et limiter fortement la prolifération de la location saisonnière pour redonner du souffle au marché de la location traditionnelle « longue durée » et accorder la priorité à la demande locale.

Crise du logement, les bouleversements du marché locatif

C’est un fait : l’immobilier locatif souffre d’une pénurie cinglante de biens disponibles, avec une offre en appartements qui aurait chuté de 36 % en deux ans en France, selon une récente étude menée par SeLoger, alors que les loyers ont poursuivi leur progression avec 3,5 % de hausse en 2023. Une tendance exacerbée dans des villes comme Paris, qui accuse une baisse des stocks d’annonces locatives de quelque 74 % en trois ans !

Une situation imputable à de multiples facteurs, dont l’encadrement des loyers à l’œuvre dans plusieurs villes du territoire, l’interdiction de louer les biens classés G+ au DPE, mais aussi la remontée en flèche des taux d’intérêt, assortie du durcissement des conditions d’emprunt, qui ont marqué au fer rouge le marché immobilier ces deux dernières années. Et qui dit « chute de la production de crédits bancaires » dit primo-accédants et aspirants propriétaires bloqués dans leur parcours résidentiel locatif, avec de nombreux biens actuellement loués qui ne se libèrent pas.

La proposition de loi va poursuivre son parcours législatif, avec l'examen de la commission mixte paritaire (CMP) prévu le 24 juin, sa promulgation étant censée intervenir d’ici la fin de l’été.

Coup de rabot sur la niche fiscale

En l’état actuel des choses, les locations de courte durée génèrent des revenus plus importants que la location classique et bénéficient d’un régime fiscal plus attractif. Un déséquilibre sur fond d’inégalités, que le volet fiscal de la proposition de loi prévoit de corriger, en rabotant sévèrement les avantages fiscaux dont profitent les loueurs de meublés de tourisme. Plus concrètement, de nouveaux taux d’abattement forfaitaire s’appliqueront sur les revenus locatifs perçus dès 2025 :

  • Pour les meublés non classés, le taux d’allègement fiscal sera abaissé de 50 à 30 %, dans la limite de 23 000 € de chiffre d’affaires annuel contre 77 700 € actuellement.
  • Pour les meublés classés, affichant donc un confort supérieur, l'allègement fiscal passera de 71 à 50 %, dans la limite de 77 700 € de revenus locatifs annuels (contre 188 700 €).

Une remise à plat fiscale plus « égalitaire », qui permet d’aligner le nouveau taux d’abattement des meublés non classés (30 %) avec celui de la location nue.

Des outils de régulation à l’échelle des territoires

La loi Le Meur ne s’arrête pas là. En marge du volet fiscal, elle prévoit également de renforcer la réglementation et « les outils de régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale » afin de permettre aux mairies et aux collectivités territoriales de mieux contrôler et réglementer l’évolution de leur parc immobilier, et d’inciter les propriétaires à opter pour la location permanente. Une marge de manœuvre appréciable qui leur permettrait, entre autres actions, de :

  • Généraliser et rendre obligatoire pour les propriétaires de meublés la déclaration de leur bien assorti d’un numéro d’enregistrement unique, dans le cadre de la mise en place d’un téléservice national au plus tard le 1er janvier 2026 (date à définir par décret).
  • Prononcer une amende administrative de 10 000 € en cas de défaut d’enregistrement, et de 20 000 € pour toute fausse déclaration ou utilisation d’un faux numéro d’enregistrement.
  • Étendre le périmètre des communes aptes à mettre en place le régime d'autorisation au changement d’usage pour tous les locaux qui ne sont pas à usage d’habitation, sans avoir recours à l’autorisation préfectorale.
  • Fixer des quotas sur les nouvelles autorisations temporaires du changement d'usage de location de meublés touristiques.
  • Délimiter, au sein du plan local d’urbanisme (PLU), des secteurs où les nouvelles constructions seront exclusivement dévolues à la résidence principale.

Les loueurs de meublés touristiques étaient jusque-là exonérés des obligations de réaliser un diagnostic de performance énergétique (DPE). Le texte de loi rend non seulement le DPE obligatoire pour les locations de courte durée, mais impose aussi une étiquette énergétique classée D a minima pour les mises en location touristique à partir du 1er janvier 2034.

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