Alors que la France œuvre pour freiner la prolifération des meublés touristiques de type Airbnb, plusieurs villes et pays d’Europe sont passés à la vitesse supérieure pour resserrer les vis des pratiques liées à la location de courte durée. Entre crise du logement, hausse effrénée des loyers et des prix de vente, et surpopulation touristique, chacun y va de ses mesures pour tenter de contrer un phénomène, qui s’est rapidement transformé en fléau. Explications.
Essor de Airbnb, des effets délétères pour les villes touristiques
Les plateformes de type Airbnb font le bonheur de centaines de milliers de vacanciers à travers le monde. Elles leur offrent en effet une solution de logement « comme à la maison », allant de la chambrette chez l’habitant aux villas de rêve haut de gamme dans des sites paradisiaques. Mais ce qui fait le bonheur des uns a fini par faire le malheur des autres... Et pour cause : l’activité de ces plateformes a pris une ampleur sans précédent dans la plupart des villes et localités touristiques du monde entier et elle a fortement dérégulé le marché de la location traditionnelle de longue durée, au grand dam de leurs résidents. Pénurie de l’offre locative, loyers tirés vers le haut – et parfois même vers les sommets –, difficultés d’accès au logement pour les habitants et les étudiants qui s'y installent pour poursuivre leur parcours scolaire, mais aussi surpopulation touristique, bruit et tapage nocturne, dégradations diverses... Les conséquences négatives liées à la hausse de fréquentation dans les villes et stations balnéaires réputées sont multiples pour nombre de pays européens. Cela concerne également la France : la proposition de loi « visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif » a été adoptée par le Sénat en mai dernier.
Le marché européen de la location touristique à court terme a enregistré un nouveau bond de 28,3 % au 1er trimestre 2024, selon Eurostat (nombre de nuits réservées en ligne sur Airbnb, Booking, Expedia et TripAdvisor). Pour faire face à ces défis, le Parlement européen œuvre pour plus de transparence et de régulation entre les plateformes de location touristique et les autorités locales des différents pays de l’UE.
Barcelone, bientôt la fin des meublés touristiques ?
Barcelone a frappé fort. C’est bientôt la fin d’une belle love story entre la cité catalane et la location en meublé touristique. Alors que la grogne de ses habitants monte depuis plusieurs années et que les prix des loyers ont littéralement explosé, avec près de 70 % de hausse en dix ans, Barcelone est aussi confrontée à un tourisme de masse. Les meublés touristiques sont accusés de rendre la ville invivable et leurs effets néfastes se font ressentir sur son environnement, son patrimoine, et même sur certains commerces locaux, forcés de fermer boutique face à la flambée des loyers.
La ville a décidé de donner un sérieux tour de vis au surtourisme et de remédier à la pénurie de l’offre locative de longue durée. Elle a donc annoncé, par la voix de son maire socialiste, Jaume Collboni, qu'elle interdirait purement et simplement la location des quelque 10 000 logements loués en Airbnb à l'horizon de l'année 2029 afin de remettre ces biens sur le marché de la location de longue durée et de la vente. Pour être plus précis, les logements concernés par cette mesure verront leurs licences de meublés touristiques révoquées par la municipalité d’ici fin 2028.
Pour Londres et Amsterdam, les jours sont comptés
Les capitales du Royaume-Uni et des Pays-Bas n’y sont pas allées de main morte non plus en matière de restrictions à la location de logements touristiques, en imposant un nombre de jours maximal annuel. Pour Londres, la règle est celle des 90 nuitées par an pour les logements entiers, prenant place dans la capitale et sa proche périphérie. Aucune limite n’a été imposée pour les chambres chez l’habitant. En vogue depuis 2017, cette mesure a été mise en place – fait surprenant – par la plateforme Airbnb elle-même ! Elle a ainsi indiqué directement sur son site les conditions de ce plafonnement afin de « permettre aux hôtes londoniens d'agir plus facilement dans l'intérêt de tous ».
Une mesure comparable a été adoptée à Amsterdam, où la limite du nombre de nuitées, initialement fixée à 60 jours, a été rabaissée à 30 par an depuis 2019, toujours en accord avec la plateforme Airbnb. Autre spécificité : à l’exception des familles avec deux enfants, ces logements saisonniers ne peuvent accueillir plus de quatre personnes à la fois. Enfin, la capitale néerlandaise a aussi rendu obligatoires un permis et un numéro d’enregistrement pour les propriétaires désireux de louer leur logement de façon saisonnière.
Italie, des restrictions locales au plan d’action national
Alors que des villes à très haute fréquentation touristique comme Rome, Florence et Milan se sont contentées, pour l’heure, de limiter les locations de type Airbnb dans leurs centres historiques, le gouvernement italien souhaite également légiférer au niveau national pour réglementer les locations touristiques à court terme. De fait, un projet de loi a été publié l’an dernier. Il repose notamment sur deux décrets :
- L’exigence d’une durée minimale de deux nuitées, applicable dans un premier temps aux villes à haute densité touristique, comme Bari, Bologne, Cagliari, Catane, Florence, Gênes, Messine, Milan, Naples, Palerme, Reggio Calabria, Rome, Turin et Venise, puis aux autres communes touristiques de la Botte.
- L’obligation de détenir un code d'identification national, en lieu et place de la version régionale, pour les différents types d'établissements d'hébergement de courte durée.
La limitation du nombre de nuitées fait partie des mesures anti-Airbnb le plus fréquemment appliquées dans d’autres villes européennes. Vienne, en Autriche, vient tout juste d’imposer un maximum de 90 jours par an pour la location de logements individuels touristiques. Même son de cloche pour Munich et Stuttgart, où les séjours sont limités respectivement à 60 et 70 jours de location/an.
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