Dans quelle mesure la création d'une construction annexe peut-elle être considérée comme relevant du permis de construire modificatif ?
Vous venez d’obtenir un permis de construire. Vous souhaitez y inclure une annexe supplémentaire, mais vous vous demandez si le permis de construire modificatif vous le permet. Voici de quoi vous rassurer.
Un bref retour sur le permis de construire modificatif
Le droit de l’urbanisme reconnaît la faculté à tout bénéficiaire d’un permis de construire de pouvoir modifier son projet en cours de réalisation. Le dispositif garantissant cette opération est ainsi appelé « permis de construire modificatif » (PCM), dans le sens où il permet de modifier un permis de construire qui a déjà été délivré. Le PCM a donc vocation à venir ajouter, modifier ou supprimer un élément spécifique du permis initial, sans pour autant remettre en cause l’intégralité de ce dernier. Attention : il ne peut être déposé que lorsque le permis est encore en cours de validité, c'est-à-dire entre la délivrance du permis initial et la réception de la notification de conformité, délivrée par la mairie lors de l’achèvement des travaux. Après cela, il est trop tard.
Il convient de rappeler que le PCM doit également faire l’objet d’une instruction. Cette dernière est par ailleurs réalisée au regard de la réglementation applicable au moment de sa délivrance (celle du PCM), et non au regard des règles qui ont été appliquées au permis de construire initial. Cela signifie que, si les règles en matière d’urbanisme changent entre l’obtention du permis et le moment où il est question de créer une annexe, cette dernière sera soumise aux nouvelles règles, et non aux anciennes. Il est donc important de rester très attentif à toutes les éventuelles évolutions de la réglementation.
Enfin, il est important de rappeler que le PCM est lui aussi susceptible de recours. Cependant, seuls les vices propres dont il serait entaché sont susceptibles d’être invoqués à son encontre.
Cet outil, né et rendu nécessaire par la pratique, n’a toujours pas été explicitement codifié. Il s’agit aujourd’hui d’un dispositif avant tout jurisprudentiel, mais parfaitement installé dans le droit de l’urbanisme. Sa seule apparition dans le Code figure à l’article A431-7. Celui-ci reconnaît implicitement le dispositif, en précisant seulement le type de document Cerfa qu’il est nécessaire de remplir, en cas de demande de PCM.
La notion d’annexe face aux limites du permis de construire modificatif
Dans un arrêt récent du 26 juillet 2022, le Conseil d’État a rappelé qu’un PCM ne peut être valablement délivré que lorsque les modifications envisagées n’ont pas pour vocation d’apporter au projet en cours un bouleversement tel qu’il en changerait sa nature même. Avec cette décision, le juge a décidé de fixer une certaine limite à l'extension toujours plus grande du champ d’application du PCM, tout en s’alignant sur l'esprit de l'article L.600-5-1 du Code de l'urbanisme (disposition permettant au juge de surseoir à statuer au cours d’un litige pour permettre à un porteur de projet de régulariser un vice, qui pourrait entraîner l'illégalité de son permis de construire).
Par conséquent, pour qu’un PCM soit valable, il est nécessaire que le changement apporté au permis initial reste mineur. Le juge se réserve ainsi la possibilité d’effectuer une étude au cas par cas afin de déterminer dans chaque situation si une modification est justifiable, ou s’il est nécessaire de déposer un nouveau permis de construire.
En définitive, il n’existe donc pas de frontière claire entre ce qui est éligible au PCM et ce qui ne l’est pas. La subtilité réside dans l’ampleur du changement apporté, quelles que soient les caractéristiques de ce dernier.
C’est donc au regard de ce principe qu’il est désormais nécessaire de s'attarder sur la notion d’annexe. Selon le lexique national d’urbanisme, une annexe se définit comme étant « une construction secondaire, de dimensions réduites et inférieures à la construction principale, qui apporte un complément aux fonctionnalités de la construction principale. Elle doit être implantée selon un éloignement restreint entre les deux constructions afin de marquer un lien d’usage. Elle peut être accolée ou non à la construction principale avec qui elle entretient un lien fonctionnel, sans disposer d’accès direct depuis la construction principale ».
Il s’agit donc d’une construction de taille modeste et directement rattachable à une construction principale. Par définition, elle n’a donc pas vocation à venir bouleverser la nature même du permis de construire initial. Dès lors, et malgré l’analyse au cas par cas du juge, il est possible d’en conclure qu’il est possible de modifier un permis de construire initial à l’aide d’un PCM – et ce de façon quasi systématique – afin d’y inclure une annexe, dès lors que celle-ci reste qualifiable d’annexe, et que ses dimensions et son importance ne prennent pas une ampleur telle qu’elle ne pourrait plus être qualifiée de la sorte.
Il existe toujours des circonstances dans lesquelles l’ajout d’une annexe, et notamment de plusieurs annexes, pourrait avoir pour conséquence de bouleverser la nature d’un projet. C’est pourquoi l’analyse du juge reste systématique, et l’annexe ne bénéficie pas d'un passe-droit en ce sens. Toutefois, la définition même de la notion d’annexe reste tout à fait en accord avec le champ d’application du PCM.
Références juridiques
- CE, 26 juillet 2022, req. n° 437765
- CE, 25 novembre 2020, req. n° 429623
- CE, 1er octobre 2015, req. n° 374338
- CE, 2 février 2004, Req. n° 238315
- CE, 28 juillet 1999, req. n° 182167
- CE, 10 mai 1995, Req. n° 130369
- CE, 27 avril 1994, Req. n° 128478
- CE, 1 décembre 1993, Req. n° 110339
- CE, 23 juin 1993, Req n° 118776
- CE, 27 octobre 1978, req. n° 05244
- Décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015
- Code de l’urbanisme : article A431-7 / L600-5-1
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